Il faut arrêter de penser à partir de soi – ça bloque, ça use, ça empêche de voir ce qui compte. Mettez vous une fois pour toute du côté du lecteur, du récepteur. Et demandez-vous ce qui peut motiver les lecteurs à vous lire. Ça parait débile mais je vous jure que personne ne se pose cette question en ces termes, c’est toujours “qu’est ce que je peux bien dire” et “mais j’ai rien à dire !” ou “je sais pas parler de moi” et “de toute façon tout le monde s’en balek”, en boucle.

Donc pensez à vos lecteurs idéaux, les gens dont vous voulez capter l’attention. Mettez vous à leur place. Ils ouvrent leur fil, scrollent rapido entre deux réunions (2 ou 3 secondes par post…), mais à la recherche de quoi ?

Pourquoi les gens lisent des trucs sur LinkedIn ? Et comment y répondre ?

Je pense qu’ils ont 3 (+1) besoins principaux, auxquels répondent autant de catégories de contenus

  • Se distraire ou réagir, pour chopper ce petit plaisir dopaminique du nouveau quand on recharge son flux par réflexe, faute de mieux. Donc des contenus fondés sur l’émotion, le perso, parfois très putaclic il faut le dire, avec ce jeu de l’accroche (”quand je me suis retrouvé à poil dans le bureau de mon chef”) qui incite à lire la suite, à enregistrer du “dwell time” et à lâcher ce petit like qui chauffe l’algo.
  • Apprendre quelque chose – du plus pragmatique au plus visionnaire, mais toujours utile, même a minima. Ce sont personnellement les contenus que je préfèrent et qui selon moi siéent le mieux à une posture de freelance qui partage avant tout une expertise – encore faut il le faire de manière attrayante et rendre rapidement perceptible la valeur de ce que vous avez à dire (sinon on zappe).
  • Se rapprocher ou se connecter, se sentir partie d’un groupe avec des valeurs en commun, et récupérer des idées de partage pour nourrir son réseau (souvent lié au précédent bien sur). C’est une manière d’activer votre écosystème, ceux qui font le même job, de créer des ponts et/ou de faire front commun, et cela permet de se rendre visible. Mais il fait le sentir.
  • Trouver des clients ou des employeurs – ahem. Car bien sûr pas mal d’indépendants sont aussi à la recherche de contact et veulent faire leur promotion ; ils lisent et échangent avec cette idée en arrière plan. Je le mets à part car ce n’est pas un besoin lié directement aux contenus.

Et tout ceci ensemble détermine déjà ce qui est important quand on écrit :

  • Une vraie personne qui parle et pas une marque : sinon pas d’émotion. Donc votre voix, votre point de vue. Ça écarte direct l’extrême recours à ChatGPT dont le style est immédiatement reconnaissable (plus les petits émojis pourris). C’est vous qu’on veut lire. Au début personne ne lira certes, mais faut rester confiant plutôt que de copier ou faire semblant. Croyance quasi mystique : chacun a une voix qui peut porter, et qui finit par trouver son public, si on y passe le temps nécessaire.
  • Du vécu et de l’expérience avant tout – même pour parler expertise. Corolaire du 1er point bien sûr, et c’est important. Le vécu c’est de l’histoire et ça rapproche, on se projette bien plus vite avec une anecdote même futile qu’en entrant dans un point théorique. Il ne faut pas en abuser bien sûr mais plein d’histoires sont emblématiques et riches d’enseignements, alors partagez-les
  • Des informations utiles, qui apportent quelque chose au lecteur pressé. Je veux apprendre un truc en vous lisant, sinon j’arrête vite. Il faut quand même que je me couche moins bête, ou au moins que j’en ai l’impression. Les posts qui marchent le mieux sont soit au service de l’indignation, soit apportent des conseils pratiques – “commentez GPT pour recevoir mon prompt magique” qui ne l’a jamais fait (et toujours déçu après, oui).
  • Du fun, du plaisir : c’est avant tout une distraction ! Cela passe d’ailleurs autant par l’indignation et l’émotion que par l’humour ou juste le plaisir de lire un truc bien envoyé. Le coup de gueule, c’est génial. L’émotion c’est difficile à retranscrire mais quand on y parvient miracle. Etc.

Conseil : 3 axes pour structurer votre prise de parole + des exemples des sujets

De quoi parler (bis) ? Pour certains c’est facile, pour d’autres c’est l’angoisse. Pour vous aider je vous partage ma matrice habituelle en 3 axes qui permet de lister déjà pas mal de sujets de posts intéressants pour ceux qui vous lisent.

Le tout dérivé de mon offre de coaching LinkedIn (ce qui ne vous surprendra pas).

La matrice dans sa version entrepreneur.se

1/ Premier tiers : parler de vous – en partant du vécu professionnel – pour vous faire connaitre

(Au risque de me répéter) je veux voir une vraie personne pas un egotrip en pleine mise en scène. Humilité avant tout, ce que certains CEO n’ont pas encore compris. Dans le doute autant rajouter du sincère et de l’humble – le tout ancré dans le vécu. Une anecdote ? Bien. Une anecdote qui ne vous met pas particulièrement en valeur ? Encore mieux, à condition que ce soit vrai, et pas de l’humilité ostentatoire.

Ce que j’attends : que vous parliez de vos expériences pros qui résonnent dans le perso : oui c’est un peu cliché, mais ça peut avoir de la valeur (”mon premier client a été horrible et m’a appris ces 3 leçons” – et avec le selfie SVP, vous voyez le genre ?). En laissant une place a l’émotion, de temps en temps.

Bref on écrit pour les autres mais on assume son point de vue, sa sincérité. Écrire tout court quoi.

Quelques idées de formats ou d’accroches

  • L’épreuve horrible que vous avez surmontée (”je n’avais pas prévu de …. mais ça a changé ma life” / ”Le jour où j’ai perdu …” / “Mon pire moment dans ce job : “)
  • Les souvenirs comiques qui vous ont appris des trucs au travail (”Le jour où j’ai imprimé 1000 pages par erreur”)
  • Les regards que les autres ont porté sur vous (”j’étais très fier de faire passer des entretiens d’embauches efficaces, mais en fait j’étais un c*nnard”)
  • Quand vous avez enfin compris ce truc fondamental (”quand j’ai compris que X, ça a totalement bousculé ma façon de travailler”)
  • Ce qui vous a fait commencer dans telle boite ou tel métier (”j’aurais du écouter ma mère quand elle me disait qu’elle ne comprenait rien à…”)
  • Le rag to riches, classique (”Il y a X années j’étais au fond du trou, je n’avais rien sur mon compte et mon banquier était la seule personne qui me parlait, et pas gentiment. Depuis je me suis fait de c* en or mais je n’oublie jamais d’où je viens, etc…”)
  • Cette rencontre qui vous a marqué toute votre vie. “De combien de rencontres vous vous souvenez des années après ? etc”.
  • Les principes et les règles, surtout en mode bullet point : “Les règles que je me fixe pour tenir” / “5 choses que je fais toujours en entretien d’embauche”

2/ Deuxième tiers : votre vision, aka passer dans une logique de thought leadership

Qu’est ce que le though leadership ? Ma définition : être reconnu par son expertise. Magique quand on y pense. Pas facile d’arriver au top et au saint graal des TopVoices LinkedIn (qui sont d’ailleurs souvent assez médiocres, mais c’est une autre histoire) mais en attendant vous pouvez déjà apporter des idées et des infos à vos clients ou prospects et à votre cercle restreint. C’est ce premier cercle qui pourra vous propulser ensuite.

Quand on est expert on informe, on transmet, on éduque. Donc votre valeur est dans le partage de vos compétences et de votre savoir faire, mis en perspective au regard du métier et du secteur, et de manière applicable voire parfois en mode tuto (utile aussi pour parler de votre offre, cf plus bas).

Donc : dire des choses que les gens ne savent pas encore où dont ils ne mesurent pas l’importance mais dans lesquelles ils peuvent se reconnaître, vous remercier de l’avoir dit tout haut alors qu’ils ne savaient pas tout à fait comment le dire ou tournaient autour du sujet.

ce que j’attends d’un expert :

  • du point de vue ancré dans la pratique, l’expérience, le réel (”être un DA free, c’est d’abord savoir dire non à un client” – j’invente mais vous voyez l’idée ou encore “ma conviction sur Adobe : c’est la pire arnaque”)
  • du recul sur le métier (”la progression exponentielle des générateurs d’image vu tuer les DA médiocres et enrichir les bons” – idem j’invente)
  • du recul sur le secteur (”le manque de culture design en France coûte cher aux entreprises, et créée une opportunité immense pour celles qui savent” – idem)
  • une veille intelligente (”3 choses que je retiens de cette étude / de cet article sur la culture design claquée en France”)
  • du rebond commenté sur l’actu importante (”tout le monde se plaint du logo Decathlon, mais pour les mauvaises raisons”)

Vous pouvez bien sûr utiliser des formats tout fait

  • Unpopular opinion : les DA sont plus des stagiaires que des directeurs”
  • La fausse dénonciation : “ceux qui font ça se croient malins mais ils vont se faire avoir comme les autres”
  • le people review : “Ce qui a rendu X célèbre n’est pas ce que vous croyez”
  • le listicle : « 5 faits que vous ignorez sur mon secteur »
  • « les idées reçues qui coutent cher à tout le monde »
  • compétence sous estimée dans le secteur” (pompé à TiboLouis)

3/ Dernier tiers : racontez ce que vous faites et surtout ce que vous proposez

Enfin les choses sérieuses. Si les deux précédents thèmes peuvent vous rendre visible et attachant.e c’est au moment de boucler sur l’offre que vous allez pouvoir rencontrer votre marché. C’est donc là où vous allez générer des leads et des ventes : en parlant de ce que vous offrez, pourquoi vous l’offrez, comment vous l’offrez, en quoi c’est important, mieux, différent.

Donc on passe de la vision du métier au détail des offres que vous vendez ou à l’exposé de vos méthodes et pratiques, vos références si vous en avez, vos projets réussis, vos manières de faire, etc.

  • Les besoins insatisfaits chez les clients et comment je les adresse (”il y a 5 pain points qui reviennent en permanence dans le design” ou “A chaque AMOA je vois la même erreur sur la navigation”, etc.). C’est le meilleur point de départ car vous êtes directement dans la compréhension du problème qui va faire écho aux besoins de vos prospects. L’enjeu bien sûr c’est de trouver les sources et les problèmes (repartez de vos ventes).
  • Les méthodes ou techniques : “Voici la liste des 5 outils pour mon business que j’utilise en permanence” “Tout ceux qui utilisent la grille le font à l’envers, alors que…”
  • La référence ou le témoignage : “C’est génial de collaborer avec (client) dans la durée, car on peut faire des choses top” (svp pas “fier d’avoir sorti X” on s’en balek) / “retour sur notre collaboration en 5 images” etc.
  • Le point de vue opé : “le meilleur moment c’est la prise de brief, c’est pour ça que je refuse les clients qui n’organisent pas de réunion dédiée…” / “Pourquoi je réponds / réponds pas à tel type de brief”
  • L’anecdote business : “Mon meilleur client m’a fait changer mon offre et comprendre ce qui était important…”
  • Les cas clients avant / après (réels ou génériques) “Vous voulez une vision créative et vous êtes frustrés par ce que les agences, les frees ou même vos équipes vous proposent ?” / “retour sur nitr
  • Les carrousels bien sûr : “5 techniques pour gérer vos dégradés”, “les 5 tendances qui montent sur le design aéré”, “Comment régler enfin tel pain point ?” etc. etc.
  • Les sondages enfin, qui ont le mérite d’activer l’audience au delà du simple like, permettent de tester des intuitions ou des offres et de recueillir (si ça tourne) les noms des personnes intéressées. Facile à faire, mais il ne faut pas en abuser.

(plus d’info sur les formats autres que texte + illustration dans le chapitre suivant)

Quel dosage entre les 3 tiers vous / vision / offre ?

Visez l’équilibre, à deux niveaux :

  • les posts vite faits vs. les posts longs à écrire. D’expérience un rant écrit sur le téléphone en 5 minute marche parfois mieux (en termes de vues et de likes) qu’un carrousel qui vous a pris des heures (mais si le carrousel décolle, bingo) ;
  • les posts anecdotes lights ou point de vue d’une part et les posts vision et offres de l’autre. Vous devez garder une dose d’humanité mais aussi (et c’est souvent le plus dur) affirmer clairement et régulièrement que vous vendez des trucs et que vous cherchez des clients. Side note : il n’y a pas de honte à chercher des clients hein, même si c’est souvent auto-perçu comme du “racolage”. Auto perception qui est bien de l’autocensure.