Face à la « grande inversion » où l’exposition digitale devient cruciale pour les entreprises, l’employee advocacy sur LinkedIn semble être LA solution miracle. Sauf que. Entre théorie séduisante et réalité du terrain, il y a un gouffre que beaucoup découvrent à leurs dépens. Décryptage des idées reçues qui plombent vos programmes avant même qu’ils ne démarrent (quand vous avez démarré, ce qui est déjà pas mal).
« Il suffit de mobiliser ses collaborateurs pour que ça marche »
C’est sans doute la plus grosse erreur de casting. L’employee advocacy, ce n’est pas transformer ses équipes en machine à poster ou bons petits soldats qui partageront aveuglément les contenus de la page entreprise. Cette approche mène droit dans le mur : partages non commentés qui tombent à plat, messages pré-écrits par ChatGPT copiés-collés, et surtout désinvestissement rapide des participants qui n’y voient aucun intérêt personnel – oui ils voient leurs stats, et « 13 vues » sur le partage de la super actu des résultats annuels ça donne pas envie.
La réalité ? Vos collaborateurs ont déjà « mieux à faire ». Pour qu’un programme tienne dans la durée, il faut partir de leur motivation intrinsèque, pas de vos besoins de communication. Le principe de base reste immuable : « what’s in it for me ? ». Il faut que le temps investi et la mise en jeu de leur réputation leur apportent un bénéfice concret pour leur propre présence en ligne.
« La page marque suffit comme point de départ »
Grave erreur. S’il n’y a pas une stratégie de contenu solide en amont, vous compliquez énormément le travail de vos speakers. C’est une chose d’assister à un événement et de prendre un selfie en taguant tout le monde (et d’ailleurs ça prend du temps !), mais cela ne dit pas ce qu’on peut raconter d’utile ou comment structurer un point de vue.
Il faut un fil rouge de marque, une ligne éditoriale cohérente, des contenus de qualité à repartager. Sans ce socle narratif structuré, qui encore une fois doit être celui de la marque dans son ensemble, vos collaborateurs se retrouvent livrés à eux-mêmes, sans savoir quoi dire ni comment le dire, ou juste bons à partager les yeux fermés (retour au point précédent). Le résultat ? Des messages vides ou, pire, des silences radio qui enterrent le programme.
« Il faut juste former les utilisateurs et leur expliquer les fonctions de LinkedIn »
Cette vision réductrice ignore complètement la spécificité de LinkedIn. La plateforme a ses codes, ses formats, sa culture particulière qui est aux antipodes de la communication corporate classique. Ce qui marche sur LinkedIn nécessite une liberté de ton, une certaine exposition de soi, des formules pour rendre la lecture plaisante et pousser au clic.
Le défi ? Trouver l’équilibre entre sérieux du propos et « entertainment » de la forme. Vos collaborateurs doivent intégrer cette « culture LinkedIn » tout en restant alignés avec les valeurs de l’entreprise. C’est un exercice d’équilibriste qui demande un accompagnement spécifique, pas juste une formation technique.
« Les collaborateurs vont naturellement s’exprimer »
Les injonctions contradictoires sont légion : peur de s’exposer (très répandue) versus envie d’être le bon élève. Cette tension ne pousse pas vraiment à la créativité. Beaucoup de collaborateurs restent figés, craignant de mal faire ou de dire quelque chose qui pourrait être mal interprété.
Pour concilier ces contraires, il faut mettre en place un soutien adéquat. Soit individuellement (mais c’est un luxe), soit en construisant une communauté de partage bienveillante, tournée vers l’entraide et animée dans la durée. Sans cette sécurité psychologique, vos meilleurs éléments resteront muets.
« Une fois lancé, le programme tourne tout seul »
Le fantasme de l’automatisation. Dans la réalité, les programmes d’employee advocacy qui fonctionnent nécessitent un pilotage régulier. Il faut animer la communauté, relancer les troupes, ajuster les contenus, faire le point sur les succès et rester à l’écoute des difficultés.
L’employee advocacy, c’est avant tout du relationnel. C’est créer les conditions pour que vos collaborateurs trouvent plaisir à s’exprimer et à échanger, qu’ils y voient un bénéfice personnel et professionnel. Sans cette dimension humaine, tous les outils du monde ne serviront à rien.
La voie du milieu
Plutôt que de tomber dans ces pièges, mieux vaut adopter une approche hybride qui marie les usages LinkedIn et la communication corporate (non n’allez pas vous former chez un coach pour solopreneur, c’est plein d’enseignements… inapplicables en coporate). Partir des motivations individuelles, construire une ligne éditoriale solide et surtout personnelle, accompagner l’appropriation de la culture LinkedIn, créer un environnement bienveillant, et piloter dans la durée.
L’employee advocacy, c’est magique en théorie, un peu moins en pratique. Mais avec les bonnes bases et une approche réaliste, cela reste l’un des leviers les plus puissants pour incarner votre marque et démultiplier votre présence sur LinkedIn. À condition de ne pas croire aux miracles, et de mettre le temps et les moyens conséquents.